vendredi 5 février 2021

Le destin d'une femme en 1870, Tony LIX

 Marie Antoinette LIX. Elle a vu le jour au 76 de la Grande Rue à Colmar le 31 mai 1839. Son père, François Antoine LIX, de Dambach la Ville, était aubergiste; sa mère, Françoise, née Schmitt était native de Bergheim.   

acte de naissance


L'enfance:


maison natale
Elle n'avait que 5 ans lorsque sa mère mourut. Son père, habitué des pratiques militaires qui furent les siennes avant de devenir aubergiste à la Pomme d'Or à Colmar, décida de lui apprendre l'exercice militaire, l'art de l'escrime et la méthode pour se tenir solidement à cheval. Cette façon d'élever un enfant et, qui plus est, une fille qui répondait plus au prénom de Tony qu'à ses prénoms de baptême devait lui attirer bien des remarques de la part de son entourage. 





A tel point qu'il dut consentir à se séparer  de Tony pour la faire admettre à l'Institution des Soeurs de la Divine Providence à Ribeauvillé. 


Pas facile pour cette fillette de changer du jour au lendemain de mode de vie et de se plier aux règles strictes de la pension d'en accepter la discipline et d'n suivre les règles religieuses. Mais c'est cette éducation religieuse qui sera qui sera déterminante dans la vie de Marie Antoinette.



Institution des Soeurs de la Divine Providence

Parce que cette institution lui ouvrira les portes de son entrée dans la vie active.

Parce que toute sa vie durant, Marie Antoinette sera attentive à respecter et à appliquer les préceptes religieux reçus auprès des soeurs.


La Pologne.

Ses études sont terminées. La mère supérieure de l'Institution de Ribeauvillé la présente à une famille de nobles polonais quie est à la recherche d'une préceptrice française. La rencontre de Marie Antoinette avec la famille Lubienski se fait à Paris, à l'hôtel Lambert, résidence des Czartoryski.

Hôtel Lambert à Paris


insurrection en Pologne
Quelques temps après, elle part pour le château de Sycz en Pologne où elle rejoint la famille Lubienski. Elle exercera auprès des enfants le métier d'enseignante pendant 7 ans.



Elle partage son temps avec deux autres préceptrices, anglaises et allemandes qui quitteront la Pologne dès l'invasion russe de 1863. 




M W Lubienski
Marie Antoinette, qui s'est liée d'amitié avec Maria Wanda Lubienski, restera en Pologne et s'engagera auprès de la famille de ses hôtes durant cette période sensible.




Au plus fort des troubles en Pologne,  elle vit l'insurrection et le début du mouvement de soulèvement de la noblesse.  Mieux même, elle participe à ce soulèvement. Pour aider les opposants polonais, elle n'hésite pas à se faire passer pour un homme. C'en est fini de la jeune fille au pair dans une famille respectable. Forte des enseignements militaires de son père, elle trouve sa place et répondra désormais au nom de Tony, lieutenant de hussards. Elle se battra contre les Russes qui parviennent à la capturer lors d'une embuscade. Son identité découverte, ils l'expulsent de Pologne en sa qualité de Française ainsi que l'atteste le passeport qu'elle détient.

Groupe d'insurgés Polonais


De son retour en France on retiendra qu'elle fut atteinte du choléra qui sévissait dans l'hexagone. C'est donc une convalescente bien affaiblie qui arrive à Lamarche et qui s'installe comme receveuse des postes.



 

Reçue par Victor Martin au camp de la délivrance



Durant ses tournées, elle entend parler de la  déclaration de guerre puis des revers essuyés par les armées françaises au front. Les démarches qu'elle entreprend pour se faire admettre dans l'armée régulière demeurent sans réponse: il n' y a pas de place pour une femme dans les rangs de l'armée française, même avec des états de service élogieux! Ses démarches demeurant vaines, elle s'obstine et parvient à contacter des francs-tireurs grâce à son activité dans les postes. En septembre 1870, elle est donc accueillie au sein de la compagnie de la Délivrance par Victor Martin et son comité. Là, au milieu des francs-tireurs de Lamarche, elle a enfin été acceptée comme femme militaire et intégrée au sein d'une compagnie au grade qui est le sien passant de lieutenant de hussards à celui de lieutenant de la Délivrance.



Ce premier mois de service s'est limité à des marches, des reconnaissances et du renseignement, autant de travail préparatoire aux actions à venir. Mais elle ne participera pas aux actions du camp de Lamarche car son unité se retrouvera rassemblée avec d'autres à la Bourgonce. Ce furent les premiers regroupements d'unités éparses qui devaient constituer par la suite l'armée de l'Est. En attendant cette réorganisation, notre compagnie de francs-tireurs de Lamarche sous les ordres du lieutenant Tony repousse la charge d'un escadron de cavalerie badoise sans qu'on sache, à un certain moment qui allait rester maître du terrain. 


Service ambulance
Fin octobre, à force de réorganisations des armées par le gouvernement provisoire, la compagnie doit passer sous le commandement de Garibaldi. Le lieutenant Tony, fidèle à ses opinons religieuses, refuse de passer sous les ordres de celui qui avait combattu les états pontificaux lors de la guerre pour l'unité italienne. Elle intègre donc un service des ambulances jusqu'à la fin du conflit.



Après la guerre

Si elle a reçu quelques reconnaissances pour sa bravoure, ce ne fut certes pas à la hauteur de ses exploits! Médaille d'or première classe par de l'intérieur, médaille de bronze par la société d'encouragement au bien. Mais de toutes ces distinctions, celle qui l'a le plus touchée, ce fut sans aucun doute l'épée d'honneur offerte par les Dames d'Alsace. Tout un symbole avec sa poignée en argent qui représente l'Alsace se libérant de ses chaines et sa lame portant d'un côté les mots suivants: "Les Alsaciens à leur vaillante compatriote Mlle Lix, en souvenir de la guerre 1870-1871." Cette épée est aujourd'hui visible au musée des armées où elle a été léguée par un décret de 1911.



La guerre finie, elle retrouve son travail à la poste de Lamarche pour quelques années avant d'accepter de prendre en charge un bureau de tabac à Bordeaux. En 1881, on retrouve sa trace à Paris cette fois, où elle est signalée comme "partageant avec une autre demoiselle un appartement appartenant à l'Institution des Soeurs de Notre Dame de Sion, 71 rue Notre Dame des Champs."


Rue Notre Dame des Champs Paris



C'est le temps de la réflexion et de l'écriture, interrompu par des déplacements et des dédicaces comme à Lamarche où elle signa la dédicace de son premier livre: " Aux Alsaciens exilés." en 1883. Durant cette courte carrière d'écrivain, elle aura tout de même le temps d'écrire 4 livres à caractère essentiellement patriotique.






Elle quittera Paris en 1886. A l'issue de cette coutre période d'écriture entrecoupée de traductions diverses qui lui permettront d'assurer son quotidien, elle songe à se retirer à l'hospice de St Nicolas de Port en 1897.





Elle décédera le 14 janvier 1909 et sera inhumée  dans le cimetière de St Nicolas de Port sans avoir eu la joie de voir sa chère alsace libérée.