Vente de biens
nationaux à Pompierre
Les premiers pas d’une nouvelle structure
administrative
Par la loi du 22
décembre 1789, la Constituante crée les départements au nombre de 83. Dans ce
tout nouveau découpage, Pompierre appartient au canton de Beaufremont, district
de Neufchâteau, département des Vosges.
Fidèle à son engagement, l’Assemblée Constituante
déclare biens nationaux toutes les propriétés seigneuriales et les possessions ecclésiastiques
sur le territoire français. C’est donc tout naturellement que la vente des
biens du seigneur, ceux de l’église, et ceux de certains établissements religieux
de Neufchâteau seront évalués puis mis en vente, le plus souvent par un notaire
ou un commissaire expert requis pour ce faire. Les administrateurs du
Directoire de Neufchâteau ont validé cette évaluation avec l’assentiment du
Procureur Syndic, élu par le peuple souverain pour une durée de quatre ans, et chargé
de garantir les intérêts du district et du département. A Pompierre, le
classement, l’estimation et la vente des
propriétés sont assurés par Claude François LARMINAUX et Thomas THOUVENIN
commissaires-experts, et Sébastien REGNAUD, notaire. Les décisions sont validées
sous les signatures des administrateurs néocastriens répondant aux noms de PANICHOT,
BIGOTTE et CULPAIN.
La vente des propriétés du seigneur de Lavaux
C’est Thomas
THOUVENIN, commissaire expert à Fréville qui est chargé d’estimer les biens de
l’émigré Charles Nicolas Joseph de LAVAUX. Cette vente est d’autant plus
symbolique que le seigneur de Pompierre a fui la révolution quelques mois plus
tôt, le 28 octobre 1791 pour rejoindre les armées contre -révolutionnaires
des Emigrés qui se rassemblent aux frontières du pays pour libérer la famille
royale et rétablir la monarchie. Le Comte intègre l’armée du Prince de Condé le 2 novembre de la même année avant d’être incorporé à une compagnie de
cavalerie stationnée à Ulm.
Pendant ce temps, au
village de Pompierre, Thomas THOUVENIN procède à la vente des biens du Comte de
LAVAUX.
Vente de biens du Comte du 19 fructidor
An II de la République
Le commissaire aux
comptes estime un moulin et ses dépendances appartenant à Charles Nicolas
Joseph de LAVAUX affermé pour un bail d’une cinquantaine d’années pour le prix
annuel de 472 livres.
Le moulin et ses
dépendances, ce sont un bâtiment principal avec une cuisine, un poêle, une
halle et des écuries. L’estimation comprend également un jardin potager
contenant 57 perches et un foulon construit récemment et actionné par les eaux
de l’écluse. Au niveau dépendances, on note un terrain de 71 perches nommé le
Braconnot et un pré dit des écluses.
Thomas THOUVENIN
estime le tout à 6000 livres.
Lors de la même
vente, le commissaire met en vente 7/4 de pré entre le déchargeoir et le moulin
estimé au prix de 1400 livres avec un
revenu annuel estimé à 70 livres.
Vente de biens du Comte en l’an III de la République
Charles Thouvenin
procède à la vente des biens appartenant au Seigneur de LAVAUX et affermés à
Charles MARCHAL de Sartes :
1° lot : 22
jours de terre en pisselou. Prix principal de 5340 livres, revenu annuel 283
livres
2° lot : 6
jours de terre à la Côte Jean Marchal. Prix principal 1250 livres, revenu
annuel 62 livres.
3° lot : 8
jours de terre au Rupt des Revaux. Prix principal 1700 livres, revenu annuel 60
livres
4° lot : 12
jours de terre à la Côte Jean Marchal. Prix principal 1200 livres, revenu
annuel 60 livres.
5° lot : 32
fauchées de pré au Breuil. Prix principal 17600 livres, revenu annuel 931
livres
6° lot : 7
fauchées de pré à la Feuillère. Prix principal 1200 livres, revenu annuel 60
livres
Le commissaire
expert présente les comptes de cette vente :
48 jours de terre au
prix principal de 9490 livres pour un revenu annuel de 490 livres
39 fauchées de pré
au prix principal de 18800 livre pour un revenu annuel de 991 livres
Vente de biens du Comte en l’an III de la République,
le septidi 1° décade du mois de brumaire
Après avoir estimé
et vendu des biens de l’émigré de LAVAUX, le commissaire évalue maintenant le
château et ses dépendances. La propriété comprend 15 portées de maison
d’habitation, granges et écuries, bouveries et haillis, 4 réduits à porcs et à
volailles, une cour, un jardin fruitier avec fontaine, un jardin potager de 67
perches, 9/4 de pré, 2 jours ½ de chenevière, 15 jours ¼ de terre, 15 fauchées
de pré et 2 jours de vigne.
La demeure
principale du chatelain se compose d’un château principal présente 7 portées
bâties en pavillon avec son aile sur sa gauche. Le prix de la demeure est fixé
à 20000 livres et les revenus annuels de l’exploitation sont estimés à 1000
livres. Le prix des terres adjacentes est fixé à 8000 livres pour un revenu
annuel de 400 livres.
C’est un habitant de
Bazoilles sur Meuse qui se porte acquéreur du château de Pompierre. Nicolas
THOUVENIN, maître de forges devra s’acquitter de 130 livres de frais liés à la
vente.
A noter que la
maison du gardien du château, Louis PILLOT, avec ses aisances, dépendances,
verger et chenevière, a été estimée à 1500 livres.
Les démarches de la famille de LAVAUX
Le Comte de LAVAUX
était retiré pour raisons de santé à partir de 1786 avec une commission de capitaine
de vaisseau et deux mille livres de pension sur le Trésor Royal augmentée d’une
pension d’invalidité.
Ses relations avec
les habitants de Pompierre ne sont pas au beau fixe et, dans une lettre du 1er
décembre 1789, il se plaint de vexations et d’atteintes à la propriété à
l’Assemblée Nationale.
Les choses ne
s’arrangeant décidément pas, il décide d’émigrer en 1791 et de rejoindre la
coalition royaliste opposée à la République.
Pendant cette
période Charles Nicolas Joseph de LAVAUX lutte parallèlement pour garder l’intégrité
de leurs propriétés, classées biens nationaux ; il demande sa radiation de
la liste des émigrés alors qu’il a quitté le territoire et pris les armes
contre la France.
Pour l’anecdote, le
comte produit un certificat de résidence en mai 1792 dans le département de
Mont-Terrible, chef-lieu Porrentruy, qui ne fut réuni à la France qu’en mars
1793.
La réponse des institutions
Les acquéreurs de
biens nationaux de Pompierre ont fait observer que la radiation de LAVAULX de
la liste des émigrés aurait dû être sollicitée du département des Vosges où de
LAVAULX résidait en 1791.
Respectant le
travail fait par les instances administratives de l’époque révolutionnaire, le
Ministre de la Police Générale prononce pourtant le maintien du bannissement le
16 novembre 1798. Plus tard, le général de division d’ESTOURNEL, beau-frère du
seigneur de Pompierre, écrivait le 10 avril 1800 au Ministre de la Police
Générale, et justifiait l’émigration de son beau-frère par la nécessité de «se
soustraire aux fureurs des désorganisateurs qui agitoient le département». En
janvier 1802, alors qu’il est en résidence surveillée à Reims, il rappelle
qu’il avait obtenu l’assurance du réexamen de son cas le 16 décembre précédent.
En vain, puisque la famille de LAVAUX et ses héritiers devront attendre la
Restauration pour bénéficier de la loi d’indemnisation des émigrés.
Petit rappel des
unités de mesures :
Une portée équivaut
à 120 m, une fauchée à la surface coupée en 1 jour par un individu, un jour à
35 ares, une perche à 50 m².
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