mercredi 17 mai 2023

 

Pompierre

Le village de Pompierre est situé sur la voie romaine entre Langres et Metz. Selon différentes étymologies le village était autrefois nommé Pont de Pierre, d’où ce nom aujourd’hui. Parmi les différentes explications avancées, celle de « Pont de Pierre » se justifie par l’existence d’un pont autrefois bâti sur le Mouzon. Selon ce que rapporte Grégoire de Tours, ce pont a été, en 577, le théâtre d'une rencontre historique entre Gontran, roi de Burgondie, et le jeune Childebert II, roi d'Austrasie, fils de son demi-frère. Lors de cette rencontre, le roi de Burgondie adopte son neveu, scellant les prémices de l'unification des royaumes de Burgondie et d'Austrasie.  Citons  Dom Calmet, « le Roi de Burgondie déclara ses intentions aux régents d’Austrasie et les pria d’amener le jeune roi à la villa de Pont-de-Pierre, située sur un affluent de la Meuse, à la frontière des deux royaumes entre la Mothe et Neufchâteau. »

 


L’église du village

Cette époque est rappelée par le portail de l’église de Pompierre. Pour marquer cette adoption, le roi Gontran qui avait perdu ses deux fils fit édifier une chapelle richement ornée par les meilleurs artistes de l’époque. Hélas, la région aux frontières de la Bourgogne  de la Lorraine et de la France fut le théâtre de bien des conflits. Population décimée et habitat dégradé telles furent les conditions de vie pour ne pas dire de survie dans cette région de passage. Ce qui n’empêche  pas la mémoire collective de faire son chemin. Et c’est ainsi qu’une église fut érigée sur les bases de la chapelle au XI° siècle. Le vieux portail, ce témoin d’une page d’histoire sur le séjour des petits-fils de Clovis au village,  a donc survécu à près de 8 siècles d’histoire.

En 1793, alors que les révolutionnaires détruisaient les édifices et décapitaient les statues, un habitant de Pompierre « apprenant qu’on mutilait les saints » décidait, à la nuit tombée, d’aller recouvrir d’un enduit de plâtre épais toute la façade du portail, sauvant ainsi probablement l’ensemble de la façade de l’église. Après des restaurations et une évolution de l’édifice à travers les âges, on ne parlerait plus aujourd’hui de façade mais de ce qui est devenu l’entrée principale de l’église donnant à l’ouest sur l’ancienne voie romaine.

 

La chapelle

Surmontée d’un christ appelé autrefois « Le Grand Bon Dieu de Pompierre » par les habitants du pays et des environs, cette chapelle offre une histoire bien particulière. A l’origine, un habitant de Pompierre, Jean DEMAY né vers 1650.  Jean se marie le 21 juin 1678  avec Marguerite MAIRE et s’installe comme chaudronnier. Son métier le mène bien loin de son village natal pour le commerce de la chaudronnerie. Et c’est en Espagne qu’il se retrouve en bien mauvaise posture. Alors qu’il exerçait son métier avec des compagnons de fortune, il est agressé par une bande de voleurs qui en veulent à leurs biens.  Les voyageurs furent capturés, garrottés par ces bandits qui leur réservaient un sort fatal. Demay, lié à un arbre essuyait les quolibets de ses agresseurs et attendait la mort quand, tout à coup, il eut l’idée de s’en remettre à la protection de la vierge de Sarragosse. Il fit le vœu de lui élever une chapelle dans son village s’il se sortait de ce traquenard avec la vie sauve. L’histoire ne dit pas comment, mais toujours est-il qu’il se retrouva libéré de cette bande de malfrats. En Espagne, pour honorer à sa promesse, il fait l’acquisition à Sarragosse d’une petite statue de la vierge destinée à la future chapelle. De retour dans son village natal de Pompierre, il entreprit d’ériger comme promis une chapelle qui abriterait cette statue. C’est ainsi que, depuis plus de 3 siècles, la chapelle de Notre dame du Pilier de Sarrogosse accueille le voyageur venu de Neufchâteau

 

Pompierre dans la dernière décennie avant la révolution.

Nous l’avons vu, Pompierre est un tout petit village de 500 à 600 habitants

Population relativement stable :

1779 : Naissances 3 garçons, 2 filles. Décès : 14 Mariages : 1

1780 : Naissances 17 garçons, 6 filles. Décès : 17 Mariages : 2

1781 : Naissances 10 garçons, 8 filles. Décès : 7 Mariages : 6

1782 : Naissances 3 garçons, 8 filles. Décès : 3 Mariages : 10

1783 : Naissances 16 garçons, 14 filles. Décès : 16 Mariages : 6

1784 : Naissances 12 garçons, 12 filles. Décès : 10 Mariages : 6

1785 : Naissances 7 garçons, 13 filles. Décès : 19 Mariages : 3

1786 : Naissances 12 garçons, 8 filles. Décès : 20 Mariages : 4

1787 : Naissances 9 garçons, 9 filles. Décès : 17 Mariages : 2

1788 : Naissances 16 garçons, 14 filles. Décès : 29 Mariages : 3

1789 : Naissances 10 garçons, 10 filles. Décès : 14 Mariages : 2

Au total, sur une décennie, 229 naissances (115 garçons et, 104 filles ) pour 166 décès et 45 mariages. L’état civil de la dernière décennie du XVIII° à Pompierre affiche une démographie équilibrée avec une progression d’une soixantaine d’individus sur dix ans.

 

A la veille de la Révolution

En 1789, la paroisse était desservie par Charles Henri ROCHELLE, prêtre et curé du village, nommé par le seigneur du lieu, Charles Nicolas Joseph Comte de LAVAUX; il est secondé par Joseph ROYER Prêtre vicaire du même lieu.

Charles Henri décèdera le 7 février 1791 après 44 ans passés au service de la paroisse de Pompierre et d’écriture sur les registres paroissiaux. Le premier acte enregistré par le curé Rochelle dans les registres date du 7 mars 1748. C’est l’acte de naissance de Catherine, fille de Jean MAIRE et de Marguerite CHAPLIER.





Le dernier acte signé de sa main sera celui de la naissance de Nicolas, fils de François RENAUD, laboureur et de Marie MOUGIN le 4 mai 1789.

Son acte de décès est signé par les prêtres de Soulaucourt, Nijon, Jainvilotte, Circourt et Pompierre.

Après le décès du prêtre ROCHELLE, ROYER  assurera le service de la paroisse avant d’être remplacé par Claude François MARCHAL, lui-même remplacé peu de temps après par Claude Joseph BOUCIROT qui écria le dernier acte sur les registres paroissiaux avant de passer la main à l’officier de l’état civil provisoire tout nouvellement nommé par l’Assemblée Constituante.

Le dernier acte du prêtre BOUCIROT sera celui de la naissance de Joseph  BARDOLET.

«  Joseph, fils naturel de Jeanne BARDOLET, fille de Jean BARDOLET est née le vingt quatre novembre 1792  vers les cinq heures du matin été baptisée le même jour par moi, curé soussigné. Il a eu pour parrain Joseph GUEDON, citoyen de Pompierre et pour marraine Thérèse COLAS, fille de Jacques COLAS, citoyen de Pompierre qui a déclaré ne savoir signer, ce interpellée et lecture faite, le parrain ayant signé avec moi. »



Le registre est officiellement arrêté de ces mots : « ce jourd’huy 25 novembre 1791 nous, officiers municipaux de la commune de Pompierre en exécution de la loi nous étant adressée, nous nous sommes rendus à l’église paroissiale du dit lieu nous avons clos et arrêté les registres. » signé : GUYON, MAIRE et GUILLAUME.

Le premier acte de l’état civil de Pompierre sera celui de la naissance de Barbe Catherine BRENEL. La formulation de l’acte change sensiblement : « Ce jourd’hui, 28 novembre 1792, vers les 5 heures du soir s’est transporté à la Maison du Maire de la Commune de Pompierre, maison provisoire,  et lui Maire soussigné faisant fonction d’officier public, Louis PILOT citoyen de Pompierre qui a déclaré au maire en présence de Jean RENAUD, cordonnier et citoyen de Pompierre et de Catherine PERIN, citoyenne de Vrécourt, tous les deux témoins majeurs, que vers 7 heures du soir Barbe BRENEL sa femme était accouchée en son domicile, par lui présentée à la maison commune et par lui prénommée Barbe Catherine, laquelle déclaration rédigée à l’instant,  il a signé avec Jean RENAUD . »

 

Continuité de l’état civil malgré la révolution.

Chose étrange, le changement radical et parfois violent entre les anciennes institutions et la toute nouvelle république n’a pas été significatif. Après un arrêt officiel des registres paroissiaux, c’est le maire qui s’improvise officier de l’état civil en remplacement de BOUCIROT, curé de la paroisse, le 25 novembre 1792 en attendant la nomination du nouvel officier de l’état civil en janvier 1793 qui ne sera autre que BOUCIROT, officier de l’état civil ! A l’époque déjà, le changement dans la continuité.



  A l’aube du XIX° siècle, la population de Pompierre était de 560 habitants. Le village est prêt pour vivre ou subir les transformations des habitudes, le changement de régime, les prémices d’une révolution industrielle qui seront autant d’évolutions qui transformeront durablement le quotidien de ces villageois à travers la vie et le paysage qui leur est pourtant si familier.

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